L’organisation de défense des automobilistes évite d’utiliser le mot collusion. Cependant, il dit remarquer un “nouveau phénomène” selon lequel les prix de l’essence vendus dans la plupart des régions de la province dépassent maintenant ceux de la région métropolitaine. « C’est un phénomène qu’on a commencé à remarquer en avril et qui ne s’est pas atténué depuis », déplore David Marcille, représentant de CAA-Québec. La situation est d’autant plus surprenante que la métropole impose des taxes sur les transports en commun introuvables ailleurs. Cependant, les prix dans la région sont souvent plus élevés qu’en ville.” Par région, la CAA inclut naturellement les régions dites éloignées comme la Côte-Nord et l’Abitibi par exemple. mais aussi des régions plus proches, comme l’Estrie, la Mauricie et Québec. Partout, le constat est le même : le prix à la pompe tend maintenant à dépasser celui de Montréal. Photo de Martin Chevalier
Station-service Bromont
Marges gonflées En résumé, son porte-parole affirme que seules la “grandeur des stations-service” et les “surtaxes exorbitantes” qu’elles choisissent d’imposer aux consommateurs peuvent expliquer les écarts de prix à la pompe constatés, qui subsistent malgré la baisse du prix du baril de pétrole. depuis. La CAA estime que la marge de détail (qui inclut les coûts d’exploitation – de 4,4 à 5,5 cents le litre – fixés par la Régie de l’énergie) devrait normalement se situer autour de 9 cents le litre en moyenne . Or, selon ses observations, les détaillants régionaux appliquent depuis le printemps une marge bénéficiaire moyenne de plus de 15 ou 16 cents le litre, bien au-delà de ce que la CAA jugerait raisonnable. « À Québec, une ville qui ne manque pas de trafic l’été, on a même vu des marges de 20 cents le litre, ce qui nous semble [tout à fait] une exagération », a déclaré son porte-parole. Un expert en énergie, professeur invité du Département d’économie de l’Université d’Ottawa, Jean-Thomas Bernard, peine lui aussi à expliquer ce phénomène. Une chose est certaine, précise-t-il, c’est que le conflit en Ukraine ou toute perturbation des activités logistiques mondiales n’est nullement contesté ici. De tout temps et partout en Amérique, insiste-t-il, les prix de l’essence ont été plus élevés dans les villes que dans les banlieues, en grande partie à cause des coûts d’exploitation plus élevés là-bas. Cas unique au pays “C’est une situation très inhabituelle. Vraiment, à ce moment-ci, le cas du Québec me semble assez unique par rapport à ce qu’on voit ailleurs au Canada. Jusqu’à présent, le Québec a toujours refusé de réglementer le prix de l’essence, estimant que la libre concurrence entre les détaillants suffisait à protéger les automobilistes des augmentations injustifiées dans les stations-service. Le problème, dit M. Marcille de CAA-Québec, c’est que toutes les régions ne bénéficient pas de la « saine concurrence » que nous souhaitons. Ce dernier renvoie, par exemple, au cas de zones où les distributeurs se contenteraient de leur part de marché, sans chercher à attaquer, par des baisses de prix, celle de leurs concurrents. La porte-parole de l’Association des distributeurs d’énergie du Québec, Sonia Marcotte, estime que la hausse du salaire minimum et l’augmentation des frais exigés par les compagnies de cartes de crédit pourraient justifier cet effort des détaillants pour augmenter leurs marges bénéficiaires. La plainte est encouragée Consulté à Ottawa, le Bureau de la concurrence ne peut divulguer la nature de ses enquêtes et les plaintes reçues. Cela dit, “lutter contre les comportements anticoncurrentiels dans le secteur de l’essence est une priorité”, a ajouté son porte-parole. Depuis 2008, suite à une enquête menée à Magog, Sherbrooke, Thetford Mines et Victoriaville, un total de 33 individus et 12 entreprises ont été reconnus coupables d’avoir truqué les prix de l’essence dans plusieurs marchés et condamnés à des amendes de 6 millions de dollars. En outre, six personnes ont été condamnées à un total de 54 mois de prison et à un total de 300 heures de travaux d’intérêt général.

Marge de détail moyenne1 sur l’essence au cours des 52 dernières semaines2

Gaspésie : 15,8 cents Bas-Saint-Laurent : 15,2 cents Rive-Nord : 14,1 cents Abitibi-Témiscamingue : 14,0 cents Capitale-Nationale : 13,4 cents Chaudière-Appalaches : 12,4 cents Mauricie : 11,8 cents Ottawa : 10,5 cents Estrie : 10,3 cents Centre-du-Québec : 10,2 cents Laval : 9,8 cents Montréal : 9,6 cents Saguenay–Lac-Saint-Jean : 9,2 cents Montérégie : 9,0 cents Laurentides : 8,7 cents Lanaudière : 8,0 cents

1 Y compris les taxes à la consommation. 2 Prix de l’essence ordinaire indiqués dans les plus grandes agglomérations de chaque région du Québec. D’après les données du Service d’information sur les prix du pétrole (OPIS). Source : CAA-Québec, en date du 13 septembre 2022 Avez-vous des informations à partager avec nous sur cette histoire ? Vous avez un scoop qui pourrait intéresser nos lecteurs ? Écrivez-nous ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.