Vladimir Poutine se rend en Extrême-Orient russe pour assister à des manœuvres militaires impliquant la Chine franceinfo : Quel est l’intérêt de ce sommet ? Frédéric Charillon, professeur de relations internationales : Clairement, pour Vladimir Poutine, c’est une tentative de montrer qu’il n’est pas seul. C’est le message qu’il essaie de vendre, et en interne à sa propre population, car en ce moment, les choses ne semblent pas trop bien se passer pour la Russie. En Ukraine, le Kremlin s’attendait à quelque chose de plus rapide, de plus efficace et de plus abouti. Mais, militairement, les choses ne vont pas bien. Sur le plan économique, les sanctions, même si l’économie russe semble freiner, causeront des dégâts importants à moyen terme. Ensuite, c’est pour dire “nous ne sommes pas seuls, non, l’Occident ne nous a pas isolés”. Mais ce sommet n’est-il pas là pour montrer son soutien à la Russie dans le contexte de la guerre en Ukraine ? Non, mais ce haut est bien. En effet, c’est une organisation qui existe depuis longtemps. Ce sommet n’est pas convoqué pour cette affaire entre pays qui ont décidé de soutenir Moscou. Ce n’est pas à propos de ça. Mais cela reste une opportunité que Vladimir Poutine pourrait tenter de saisir pour montrer qu’il n’est pas seul. Comment caractérisez-vous les relations entre la Chine et la Russie, est-ce plus un partenaire qu’un allié ? C’est surtout une gêne pour Pékin. Un partenaire, c’est sûr, mais le passage au statut d’allié est plus compliqué, car l’Ukraine a existé. On peut imaginer que si en fait l’aventure russe s’était mieux déroulée avec un succès immédiat, il en aurait été autrement. La Chine s’est engagée assez fortement avec un partenaire qu’elle a soutenu peu de temps avant l’invasion de l’Ukraine, qu’elle a fortement et publiquement soutenue. Mais aujourd’hui, elle se retrouve non connectée mais connectée à quelqu’un qui perd du terrain. Pékin a-t-il toujours intérêt à maintenir des relations aussi fortes avec la Russie ? Pékin a intérêt à entretenir d’excellentes relations avec la Russie car il y a une très forte opportunité économique à exploiter. Mais se mettre vraiment en colère contre Washington est une autre affaire. S’allier pleinement à Vladimir Poutine, jusqu’à rompre les liens avec l’Occident, ne serait pas un bon calcul. La politique étrangère chinoise a toujours été très prudente. C’est une politique étrangère qui ne commet pas beaucoup d’erreurs et qui ne prend pas beaucoup de risques. Nous avons rarement vu la Chine s’impliquer fortement dans les affaires internationales. C’est plutôt une politique prudente. On retrouve aujourd’hui cette attention doublée d’une gêne. Je crois qu’aujourd’hui Pékin attend de voir. Seul le temps passe et ce conflit continue.