Le nombre est horrible. Ce jeudi, EDF a annoncé que la facture de l’arrêt forcé de ses réacteurs en 2022 atteindra 29 milliards d’euros. Dans sa dernière estimation datant de juillet, le groupe EDF a fait chuter son excédent brut d’exploitation (Ebitda) de 24 milliards d’euros. Mais depuis, les prix de l’électricité n’ont cessé de s’envoler et de nouveaux retards ont été annoncés dans le démarrage des réacteurs. Un tel déficit est totalement inédit dans l’histoire d’EDF. Pour vous donner une idée de l’échelle, en 2019, avant que le Covid-19 ne perturbe le programme de maintenance des réacteurs, EDF a réalisé un Ebitda de près de 17 Md€ pour un chiffre d’affaires de 71 Md€.
L’enfer mécanique
Pour EDF les ingénieurs sont d’enfer. Confronté fin 2021 à un problème de corrosion sous contrainte, un défaut de couverture sans précédent qui touche ses réacteurs les plus récents en France, le groupe a dû arrêter au moins une dizaine de ses réacteurs par mesure de précaution. Cependant, la compagnie d’énergie vend à l’avance l’électricité qu’elle juge capable de produire dans l’année à venir. En 2022, alors que les prix de l’électricité continuaient de s’envoler suite aux énormes fluctuations du marché du gaz manipulées par le Kremlin, le groupe a donc dû racheter de l’électricité à des prix exorbitants sur les marchés de gros pour servir ses clients. Fait aggravant : au milieu de l’été, EDF a dû annoncer le report de la mise en service de quatre réacteurs touchés par ce phénomène de corrosion sous contrainte. L’équipe a signalé plusieurs difficultés, notamment que les travaux ont pris plus de temps que prévu. Conséquence : EDF devra racheter plus d’électricité que prévu sur les marchés de gros en 2022. Mais en août, lorsque Gazprom a de nouveau resserré ses approvisionnements vers l’Europe, les prix de l’électricité ont atteint un niveau record, sans précédent, largement supérieur à 1 000 euros par MWh en Europe.
Prix déflatés
Pour arriver à ce chiffre de 29 milliards, il faut aussi ajouter l’impact d’une décision prise par les pouvoirs publics en début d’année, au grand dam d’EDF. Pour amortir le choc de la hausse des prix de l’électricité en France, il a été demandé au groupe d’augmenter de 20 TWh les quotas d’électricité nucléaire vendus à prix cassés en France dans le cadre du mécanisme Arenh. Pourtant, une bonne nouvelle s’est glissée dans l’annonce d’EDF publiée aujourd’hui. Le groupe a confirmé sa prévision de production d’électricité nucléaire pour 2022. Si celle-ci est historiquement basse, elle n’en est pas moins importante si l’on veut passer l’hiver sans encombre. De plus, cette confirmation est nécessaire pour faire tomber la fièvre qui s’est emparée des marchés de l’électricité, car plusieurs acteurs du marché, dont le gestionnaire de réseau de transport RTE, ne croient pas qu’EDF soit en mesure de tenir ses promesses.
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