Que s’est-il passé au Lac des Settons ? Ce week-end, des photos postées sur Facebook font le tour du Morvan : on voit des carpes et autres poissons du lac, morts, entassés dans une poubelle et dans de gros sacs. Une page “Le Massacre de la Vidange de Setton” a même été créée.
Depuis le 16 août, le lac des Settons s’est progressivement vidé de son eau. La raison : des travaux d’étanchéité sur le barrage, construit en 1855, qui doivent être réalisés pour assurer la pérennité de l’ouvrage. Les eaux se déversent dans la rivière Cure.
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Il ne reste plus que quelques flaques d’eau au lac des Settons. • © Rémy Chidaine / France Télévisions
Sauf qu’il est impossible de relâcher les poissons du Lac des Settons dans la Cure : ils sont trop nombreux, et surtout, cela va perturber l’écosystème de cette rivière préservée. En conséquence, les pouvoirs publics, en l’occurrence la DDT (Direction Départementale des Territoires) de la Nièvre, ont procédé cette semaine à une opération de pêche aux poissons des Settons.
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Les portes du barrage ont été ouvertes pour laisser passer les poissons, qui ont ensuite été retirés avec une grille. Sept tonnes de poissons vivants ont été déplacés vers d’autres points d’eau et cinq tonnes laissées pour les restaurants, a annoncé jeudi la DDT. Mais l’opération s’est soldée par des pertes, comme le montrent ces photos.
Ces images ont suscité de vives réactions sur les réseaux sociaux. “Honteux”, “inacceptables”, peut-on lire. « Je suis malade, pourquoi n’as-tu pas mis quelque chose pour essayer de les déplacer ? demande un utilisateur. Nous avons contacté le DDT ce samedi pour savoir ce qui s’est passé.
“Une partie des poissons est morte, c’était inévitable”, reconnaît d’emblée Pierre Papadopoulos, le directeur de la DDT de la Nièvre. Il n’y a pas de chiffre exact pour les victimes, mais “la norme est de 50/50 quand vous videz un étang”: 50% de survie, 50% de mortalité. Il désapprouve ces “photos poubelles” qui ne reflètent pas la réalité, selon lui. « Nous étions probablement inquiets que tous les poissons soient morts ! Le travail qui a été fait est déjà remarquable. Nous avons récupéré 12 tonnes de poissons alors que nous pensions qu’ils allaient mourir.
Les pêcheurs du Morvan s’interrogent encore. En contact, l’un des deux créateurs de la page “Le massacre de la vidange des Settons”, Franck, explique : “Je n’ai pas l’habitude de faire un truc comme ça, mais là c’était un peu trop gros. J’ai créé ça page au nom de tous les pêcheurs.” Il regrette que les pêcheurs locaux n’aient pas été davantage sollicités pour limiter les pertes.
“On paye un permis de pêche. On pourrait nous appeler, les clubs de pêche, les pouvoirs publics pourraient nous demander de l’aide dans une zone comme celle du lac.”
Comme lui, Julien Dalle, un Nivernais également rédacteur dans un magazine de pêche, estime que tout n’a pas été fait pour conserver le plus de spécimens possible. “La vidange à cette période n’est pas possible. Les poissons ne supportent pas une eau à 20 degrés. Normalement, la vidange se fait toujours en fin d’automne-début d’hiver. L’eau est plus froide, plus oxygénée, les poissons sont plus calmes du fait de la Ils deviennent moins agités et donc moins à risque de blessure et consomment moins d’oxygène.
Alors, la vidange a-t-elle été faite au mauvais moment ? “Je suis d’accord : normalement, on vide vers novembre”, reconnaît le directeur des PTT, Pierre Papadopoulos. Sauf que d’autres problèmes sont entrés en jeu.
“Si nous attendions que l’hiver se vide, nous ne pourrions pas remettre le lac en eau à la prochaine saison estivale.”
Il fallait en effet penser aux activités maritimes et commerciales autour des Settons. De plus, pour préserver la saison touristique 2022, le début de l’évacuation a commencé à la mi-août et pas avant. “Il fallait aussi réfléchir au timing des travaux : en plein hiver, sous une averse, on aurait dû suspendre le chantier”, note DDT.
Pourquoi les poissons n’ont-ils pas été pêchés plus tôt ? “Le lac fait 15 millions de mètres cubes. Ce n’est pas possible d’attraper tous les poissons dans un tel volume ! Il fallait vider l’eau avant de ramasser les poissons”, répond Pierre Papadopoulos.
Enfin, il y a une rumeur d’un problème technique qui aurait causé une mortalité excessive des poissons : une vanne de barrage se serait bloquée. “C’est un non-sens”, lâche le directeur du DDT. Selon lui, une vanne s’est bel et bien bloquée, mais il y a plusieurs semaines. Pour vider le poisson, “on n’a de cesse d’ouvrir, de fermer, d’ouvrir, de fermer les vannes, histoire de limiter les risques de colmatage”. Il reconnaît cependant : « Alors, effectivement, au fur et à mesure que les poissons passent dans les vannes, certains sont écrasés et meurent pendant l’opération.
Malgré les images choquantes de poissons morts circulant, la principale préoccupation des pouvoirs publics se situait au niveau de la rivière en aval du barrage : la Cure.
“Il ne faut pas oublier que les Settons sont un lac artificiel. Nous n’avons pas massacré la nature. La guérison, en revanche, est naturelle.”
La question cruciale était d’éviter les écoulements excessifs de limon dans cette rivière de catégorie 1. « Il fallait à la fois gérer la pêche des poissons des Settons et gérer la conservation de l’écosystème de la Cure. Nous avons réussi à limiter l’apport de sédiments à la Cure à 0,1 gramme par litre d’eau, donc le rejet était estimé à 8 grammes par litre au départ ! accueille Pierre Papadopoulos.