Ce dernier, qui a battu l’ancien ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer dans la Loire, se souviendra longtemps de la nuit du 21 au 22 juillet. Les 89 députés du parti d’extrême droite viennent de voter en faveur du texte sur le pouvoir d’achat du gouvernement, et Jean-Philippe Tanguy est sur le carreau. “Le silence! Silence pour la France !” assène-t-il, tôt le matin après d’interminables discussions, pour tenter de calmer les députés de La France insoumise. Un « cri du cœur », comme il aime à le nommer, et des envolées lyriques dans l’hémisphère qui lui ont donné une autre dimension politique. Ce nouveau statut d’homme fort RN que personne n’a vraiment vu venir. “Jean-Philippe est une révélation pour moi. Je savais qu’il était bon, mais je ne pensais pas qu’il serait aussi à l’aise”, raconte Caroline Parmentier, ancienne attachée de presse de Marine Le Pen, assise à côté de lui au Palais-Bourbon. . “Il me fait beaucoup rire. En fait, il me rappelle l’humoriste Thierry Le Luron. Physiquement, mais surtout pour son esprit et ses coups souvent très drôles.” Caroline Parmentier, députée RN du Pas-de-Calais chez franceinfo Si cette séquence intemporelle a beaucoup amusé Marine Le Pen à l’époque, la patronne du RN n’a pas hésité à redéfinir son nouveau poulain dans ses discours parfois “très cash”. “Il m’a dit qu’il fallait que je change de style lors de mes interventions. Ne pas être uniquement sur l’attaque frontale. Il a raison. En même temps, quand Marine Le Pen vous donne des conseils, vous l’écoutez”, affirme Jean- Philippe. Tanguy. Début juillet, son départ controversé au milieu du scandale des records Uber avait d’ailleurs secoué jusqu’aux rangs du RN. Le député de la Somme, qui le regrette aujourd’hui, avait évoqué les “ambitions homosexuelles” qu’Emmanuel Macron pouvait demander à “un certain nombre de cadres” chez Uber lorsqu’il était banquier. Jean-Philippe Tanguy, que ses proches s’amusent à comparer à “un parlementaire à l’ancienne, façon Troisième République”, n’est en réalité pas un novice du tout. “Je travaille dans l’ombre depuis dix ans, mais très activement pour l’instance dirigeante nationale”, se souvient-il, avec son bavardage habituel. Bras droit de Nicolas Dupont-Aignan pendant huit ans, Gaullist a quitté son ancien patron pour rejoindre les rangs du RN en 2020. Un départ douloureux que le leader de Debout la France n’a pas encore digéré. “Je ne m’enfonce pas dans le caniveau dont certains font commerce. Ils apprendront qu’on ne réussit jamais sans pouvoir se regarder dans le miroir. Vu les enjeux du pays, s’il vous plaît, un peu de hauteur”, gémit-il auprès de franceinfo . Jean-Philippe Tanguy étant député, les deux hommes ont tenté de se rafistoler dans les couloirs de l’Assemblée. Mais les rancunes sont tenaces. “Nicolas Dupont-Aignan est un individualiste, il ne veut plus de députés élus de son mouvement. Mais tout cela n’est pas conscient en lui : il n’a jamais établi de grands plans machiavéliques pour piéger les gens”, fustige Jean-Philippe Tanguy. Très critique du choix de son ancien mentor de ne pas s’allier à Marine Le Pen lors des élections législatives et européennes de 2017 et 2019, Jean-Philippe Tanguy avoue cependant qu’il lui “a beaucoup appris”. “L’école Dupont-Aignan est une bonne école. Quand tu as un homme qui te donne des cours particuliers de politique pendant plusieurs années, ça aide forcément pour l’avenir”, déclare à franceinfo Alexis Villepelet, l’actuel représentant de Stand up France. “La bonne école”, le jeune député explique qu’il l’a aussi connue lorsqu’il travaillait comme pensionnaire, puis comme apprenti chez Clara Gaymar, présidente de General Electric France. Au cours de cette expérience professionnelle de trois ans, il a pu devenir un expert en énergie. « Quand il travaillait avec nous sur Debout la France, je me souviens qu’il avait essayé d’écrire un livre de 600 pages sur l’énergie. Il nous parlait toujours des réservoirs de carburant que les gens modérés doivent remplir pour se réchauffer. Il disait qu’avec l’inflation qui risquait de se produire dans les années à venir, ce serait de plus en plus compliqué pour eux”, rapporte Alexis Villepelet. Jean-Philippe Tanguy met aujourd’hui cette connaissance des matières techniques et son “extraordinaire capacité à travailler, même de nuit” au service du RN, selon ses proches. La jeune diplômée de l’Essec était aussi l’une de celles qui ont travaillé le plus activement, en tant que directrice adjointe de campagne de Marine Le Pen, sur la question du pouvoir d’achat. “En septembre, quand Marine nous a dit que l’enjeu de la campagne serait le pouvoir d’achat, Jean-Philippe a été l’un des premiers, sinon le premier, à dire qu’il fallait baisser la TVA à 0% sur l’essentiel”, confirme la députée. du Parlement du Nord, Sébastien Chenu. Avec Jean-Philippe Tanguy, nous avons désormais un véritable expert financier chez RN. C’est la pièce qui manquait à notre appareil” Sébastien Chenu, adjoint RN du Nord chez franceinfo Ce rôle « d’expert financier » au cœur de la marinière était pris très au sérieux par Jean-Philippe Tanguy. Mais il préfère louer l’œuvre d’Horace. Ce petit club confidentiel, composé de hauts fonctionnaires et de chefs d’entreprises influents, a développé une grande partie du projet présidentiel du député du Pas-de-Calais, notamment sur la réforme du système des retraites. “Oui, j’ai pu aider en mettant en relation le candidat et des gens qui étaient plus techniques que politiques. Mais c’est vrai que j’aime intensifier les enjeux financiers, car j’ai été formé à ces enjeux pendant longtemps”, confie le diplômé de Sciences Po Paris. Même le rebelle Eric Coquerel, élu haut la main contre lui en juillet à la tête de la fameuse commission économique de l’Assemblée, a du mal à lui reprocher. “C’est avant tout un député d’extrême droite. Mais contrairement à beaucoup d’autres, il a un peu plus d’expertise dans les archives. Cela lui permet d’être un peu plus malin et de mettre ses connaissances au service de “un peu de tactique et moins de caricature”. », crache le député de LFI de Saint-Saint-Denis. Pour son collègue Alexis Corbière, les critiques sont en revanche plus vives. “Un discours raté, un soutien à Emmanuel Macron pour des mesures inciviles, une candidature ratée : beau bilan !”, tacle-t-il auprès des insoumis. Quand il regarde en arrière aujourd’hui, Jean-Philippe Tanguy n’imaginait pas ce début de carrière supersonique. Le natif de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais) qui a rapidement voulu s’émanciper de ses parents, secrétaire et gérant d’une usine de meubles, n’était pas vraiment destiné à la politique. “Grâce à mes lectures, je connais tellement bien mon pays aujourd’hui. Ma passion pour l’histoire m’a aussi beaucoup aidé”, confie le trentenaire. Pour payer ses études, lorsqu’il arrive à Paris à l’âge de 18 ans, il travaille comme serveur dans une crêperie à Beaubourg. Mais sans gros revenus, il est difficile pour le jeune étudiant de trouver un logement dans la capitale. Je me suis retrouvé à Paris sur une tige de la place de Clichy. Un 7m2 sans cuisine. Je réchauffais mes repas sur une cuisinière électrique dans le couloir. Beaucoup de gens vivent comme ça en France.” Jean-Philippe Tanguy, député RN de la Somme chez franceinfo A moins de cinq ans de la prochaine élection présidentielle, Jean-Philippe Tanguy casse les codes d’un parti qui tente de se montrer amical. L’objectif est clair : professionnaliser le Rassemblement national dès l’Assemblée en envoyant au front de nouveaux élus qui incarnent ce RN « nouveau look ». La décision de Marine Le Pen de proposer au député de la Somme la tâche de numéro deux du groupe à l’Assemblée nationale n’est pas anodine. Tout comme le choix de l’envoyer comme candidat à la présidence de la commission des finances de la chambre basse. Ambition, jeunesse, matière grise… Si certains dans l’opposition voient dans ce visage montant du RN le nouveau Florian Philippot, la comparaison ne plaît pas à Jean-Philippe Tanguy et ses proches. « A cette époque, Florian Philippot avait tenté d’imposer une autre ligne politique et surtout son visage pour faire de l’ombre à Marine Le Pen. Là, ce n’est pas du tout le cas : ce groupe parlementaire est là pour promouvoir la candidature et la victoire de Marine Le Pen. en 2027 et Jean-Philippe fait partie de cette pierre angulaire vers la victoire », se défend Thomas Ménagé. “Marine Le Pen est l’incarnation même de notre famille politique, tant par ses qualités humaines que par ses idées. Nous sommes à son service, comme les gaullistes avec leur général.” Jean-Philippe Tanguy, député RN de la Somme chez franceinfo Jusqu’où ira le dévoué Jean-Philippe Tanguy ? Si certains au sein du RN l’imaginent déjà comme le futur ministre de l’Economie en cas de victoire de Marine Le Pen aux Elysées en 2027, le…