Le premier juge de Bretoncelles rit jaune. Tout ne va pas bien, en fait. Le bricoleur à la retraite, qui joue le Père Noël chaque hiver dans la rue principale, a menti à tout le monde. Albertine, née le 31 décembre 1923, est décédée chez elle et n’a pas bougé depuis au moins huit ans, peut-être dix, s’aventurait le journal local Le Perche en un, mercredi 14 septembre. Le fils a gardé son secret jusqu’à ces dernières semaines. Le parquet d’Alençon a ouvert une enquête, qui a été confiée aux gendarmes de Mortan-au-Percé. Déjà, les cas de déni de décès circulent, tout comme il y a les dénis de grossesse. Sinon, comment expliquer l’improbable ? Daniel, le fils d’Albertine, jouait le Père Noël en hiver dans la rue principale de Bretoncelles (Orne). Docteur Pendant des années, la C15 bleue du chauffagiste s’est arrêtée presque quotidiennement devant la maison aux murs de sable de sa mère, nichée derrière les ormes, à La Booz. Le paysage de ce hameau dessine une image de carte postale, avec ses marais salants rouges sur l’herbe douce, les myrtilles offertes aux promeneurs sur les chemins de terre ombragés de chênes, le grand silo à grains se découpant en arrière-plan.
Un beau jour le téléphone a sonné
Albertine, ou plutôt Marguerite – elle aimait qu’on l’appelle par son deuxième prénom – est passée au second plan. Peu se souviennent de cette vieille femme en tablier, un bonnet de laine sur ses longs cheveux gris. L’ancienne gouvernante du médecin de Bretoncelles, réputée si tendre pour les petits, fit promettre à son fils de la laisser finir ses jours ici. Chaque jour, entre deux chantiers, le fil passe. Le copain, près de 100 kg pour un bon 1,85 m, apporte les courses, gère les factures, paie les factures et les taxes. Il travaille pour lui-même, a sa liberté et n’a pas d’enfants. “C’est une crème”, dit une jeune femme du village. On sait qu’il est passionné par la “grande cuisine”. Son père est décédé en 2003. Pierre, le frère aîné, habite loin et n’a pas été revu depuis des années. Annick, l’épouse de Daniel, se querelle depuis longtemps avec sa belle-mère, tout le monde le sait en ville – cette femme puissante est aussi une personnalité locale, coiffeuse à Bretoncelles depuis quarante ans et conseillère. Elle n’a pas « le droit » d’entrer chez Albertine et obéit sans qu’on le lui demande. Il n’y a que la mère et le fils. Annique (premier rang au centre), la femme de Daniel, conseillère, n’est pas allée chez sa belle-mère depuis des années. Docteur “Albertine parlait de lui avec beaucoup d’affection, et elle ne manquait de rien dans la petite chambre où il était toujours”, témoigne Cécile (prénom changé), l’une des rares à avoir longtemps fréquenté la vieille femme. Un jour ce n’était plus possible. « Le téléphone était coupé et la sonnette ne fonctionnait plus. Il rate son rendez-vous. Ouest-France, dans sa cinquième édition, fait référence à l’année 2014. n’insistez pas. »
Un rituel maintenu malgré le Covid
La C15 traverse encore régulièrement le ruisseau, sur la route communale qui monte à La Booz. Daniel entre avec des sacs de courses, sort avec des poubelles. Le portail haut, la clôture en béton devant, l’épaisse palissade sur le côté de la propriété empêchent quiconque de cogner sur les tuiles. Et qui le ferait ? Ce coin de campagne attire depuis plusieurs années néo-agriculteurs et citadins, transformant d’anciennes cabanes en ravissantes résidences secondaires. Les volets ne sont ouverts que les week-ends et jours fériés. Les nouveaux arrivants pensent que la maison est abandonnée. Un voisin, plus âgé que les autres, jeta un coup d’œil dans le jardin. “L’herbe devant la porte n’a pas été foulée”, preuve que “personne n’est venu”. Elle se culpabilise. « Nous aurions dû remarquer que la cheminée ne fumait pas en hiver. Claude, un retraité qui habite un peu plus haut dans Marion Valley, a demandé à Daniel. « Il m’a dit de ne pas m’inquiéter, que sa mère était en Ehpad. » Daniel était le seul à se rendre au domicile de sa mère, Albertine, dite Marguerite, où le téléphone avait été coupé. LP/Olivier Corsan Depuis 2019, de graves problèmes de santé, puis le Covid, ont épinglé Daniel à l’hôpital pendant de longues semaines. Alors qui s’occupe d’Albertine ? Personne ne sait. Puis Daniel revient, il a maigri, il ne peut plus conduire. C’est sa femme, Annik, qui le dépose devant la maison, dans une voiture blanche. Il ouvre le portail avec les courses, ressort avec les poubelles. Annik le prend.
Daniel parle à sa femme et s’effondre
Nous sommes en juillet 2022, et cette canicule fait suer même la Normandie. Le maire appelle un à un les plus de 90. Pour Albertine, impossible de trouver un numéro. Il se rend à La Booz, un voisin lui demande : “As-tu des nouvelles ?” “Il fait l’amour une énième fois avec Annick, qui répète ce que son mari dit toujours : ‘Ça va. Cette fois, le conseiller insiste. Il menace d’appeler les gendarmes, pour vérifier. Quatre jours plus tard, le 29 août, son portable sonne en pleine réunion des vice-présidents de la communauté des communautés. C’est Annick : « Il faut venir, c’est très, très urgent. Devant la maison, les pompiers sont déjà là, penchés sur le collègue à barbe blanche au sol. Daniel est tombé malade immédiatement après avoir parlé. Les enquêteurs ont fouillé la maison d’Albertine à La Booz pendant un certain temps et des scellés ont été apposés. LP/Olivier Corsan « Est-ce qu’Albertine est morte ? demande le conseiller. « Depuis hier ? Annik ouvre les yeux d’effroi. « Depuis une semaine ? “Depuis des années. L’épouse et assistante jure qu’elle ne savait pas. Le maire la croit. Au village, on s’interroge. Qui a touché la pension et la pension de survivant du père pendant toutes ces années? La gendarmerie enquête, mais la rumeur publique condamne déjà, mezos, ceux dont le scandale s’est produit à Bretoncelles. “On se demande tous comment c’est possible”, témoigne un commerçant. Une cliente a fondu en larmes dans son magasin jeudi. Ici, les plus de 70 ans sont nombreux, beaucoup supposent que les parents sont presque centenaires.
Des villageois pris entre doutes et regrets
“Il y a un peu de culpabilité en chacun de nous”, confie un élu de la ville qui souhaiterait “une messe ou une cérémonie” en hommage à Albertine. Regard triste : « Nous n’avions aucune raison de douter de la parole de Daniel et Annick, pas eux ! D’autres, moins sympathiques, prévoient des peines de prison. La non-déclaration de décès ne répond cependant à aucune qualification pénale. Mais les fonds collectés après la mort d’Albertine devront être restitués aux associations. Des enquêteurs en uniforme ont longuement inspecté la maison de La Booz et envoyé les ossements pour analyse au service d’anthropologie de l’IRCGN, le laboratoire d’enquête criminelle, qui devra identifier officiellement le corps et dater sa mort. La police a mis des scellés sur la porte. Juste à l’arrière, il reste le dernier cabas apporté chez Albertine, laissé ouvert au milieu du jardin sauvage et rempli de ronces. Cet été, en pleine canicule, le maire a appelé tous les seniors de sa commune. N’ayant pas de nouvelles d’Albertine, il exprime son désir d’appeler les gendarmes pour vérifier son état. Quelque temps plus tard, Daniel a tout avoué à sa femme. LP/Olivier Corsan A la demande du conseil municipal, effrayé par le scandale, Annik rend son écharpe tricolore ainsi que les clés de la mairie. Son poste d’assistante à la sécurité, aux fêtes et aux cérémonies a été supprimé vendredi soir. Annik n’ouvre pas la porte aux journalistes, elle “se cache un peu”, témoigne une de ses connaissances, qui pense qu’elle part, loin de Bretonchel. Daniel, hospitalisé depuis le 29 août, a été entendu une fois par les gendarmes “mais depuis, il ne peut plus parler”, a indiqué une personne proche du dossier. Son état de santé est jugé alarmant.